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La fabrication du papier de soie de Samarcande

Le monde est rempli de merveilles. Il y en a pas mal dans ce bas monde. Et l'une d'elles est le papier de soie de Samarcande, qui est aussi la plus grande fierté de l'artisanat en Ouzbékistan. L'agence de voyage locale Adventure Central Asia nous raconte son histoire et le processus de sa fabrication.

L'histoire du papier de soie de Samarcande

Le papier de soie de Samarcande est fabriqué à partir de branches de mûrier.

Parmi ces phénomènes que produisent le hasard et la nécessité, l’histoire a placé Samarcande à l’origine du meilleur papier qu’eut jamais connu le monde médiéval. Parmi les métiers rares qui ont vu le jour à Samarcande, ville renommée au carrefour des voies commerciales sur la Route de la Soie, une place importante revient à la production du papier dit de soie. La fabrication de ce papier repose essentiellement non pas comme à l’origine en Chine et jusqu’au XVIII siècle dans ce pays, sur l’utilisation onéreuse du cocon des vers à soie qui mangent les feuilles du mûrier mais sur l’emploi plus économique de la fibre des branchages de cet arbuste que les vers ne consomment pas et dont on ne savait quoi faire d’autre que du combustible avant l’invention d’un papier bon marché, d’usage commode et agréable à l’œil pour n’être pas trop blanc. Ce qui est moins confortable pour les yeux.

L’idée, née à Samarcande d’utiliser l’écorce du mûrier, a eu pour conséquence de libérer la production du papier de sa dépendance à la canne de bambou, aux vers à soie où aux roseaux du Nil, en même temps que d’en abaisser son prix et d’en améliorer sa qualité. De pluis, Samarcande a été reconnue comme la première ville du Moyen-Orient, qui non seulement fabriquait du papier à la main mais aussi en utilisant pour y parvenir l’énergie d’un moulin à eau pour la trituration des fibres végétales qui est une opération toujours incluse dans les procédés actuels. Toutefois, et pour le motif ci-dessous l’usage du papier ne s’est que très progressivement propagé dans le monde occidental en Asie mineure, en Egypte puis dans le monde occidental. Pourtant à la fin de XVIIIs la production du papier de soie commence à péricliter.

L’histoire continue ?

Oui, jusqu’ à nos jours car aux environs immédiats de Samarcande, près d’une petite rivière la Siab il y a un petit village appellé Koni-Ghil qu’on pourrait traduire par «puits d’argile» On a construit le moulin à l’endroit même où 300 ans plus tôt les premiers maitres ont travaillés sur le premier morceau de ce fameux papier... Actuellement leurs successeurs ont régénérés la production selon les méthodes ancestrales avec leurs secrets de fabrication et s’est si vrai que l’association qui préside à la destinée de «Koni –Ghil» porte le nom de «Meros» qui veut dire «héritage» et que soutiennent de grandes organisations telles que: l'UNESCO, la JICA-l’Agence Japonaise Internationale, où encore par les Etats-Unis via le Fonds d’aide aux Artisans. Si bien que la production de ce moulin à papier permet aujourd’hui de restaurer et de rééditer des livres anciens sur le point de disparaître et que les miniaturistes modernes régénèrent avec bonheur. L’avenir du papier de Samarcande semble donc ainsi bien assuré. Presque tous les secrets de la fabrication du papier de Samarcande

L'évolution dans la fabrication du papier de soie de Samarcande

Processus de fabrication du papier.

La grande nouveauté dans la fabrication du papier de Samarcande réside dans l’emploi de l’écorce du mûrier de la manière suivante. On commence par couper des branches de mûriers qu’on trouve partout alentour. Ensuite on écorce ces branches selon des règles ancestrales bien précises. Puis on fait bouillir ces écorces dans une chaudière pour en obtenir une masse pâteuse. Ensuite on ramollit cette masse dans l’eau avant de la transformer en pâte en la broyant-longuement sous des pilons- actionnés par une roue- à aubes installée sur la rivière. Et là aussi c’est tout un savoir- faire que d’obtenir la meilleure consistance sans briser- les fibres végétales. On ajoute parfois dans cette masse les écorces du coton, des fils de soie et de laine, des pétales de la rose. Puis cette pâte est savamment diluée- en flocons –qu’on prélève avec précaution dans des tamis qu’on empile sous une presse à vis pour évacuer le plus possible d’humidité. Enfin on retire délicatement de chaque tamis ce qui est déjà une feuille de papier qui ne demande qu’à sécher au soleil avant d’être lissée avec une pierre d’agate qu’on passe et qu’on repasse à la force du poignet sur les faces de chaque feuille une à une pour les rendre luisantes. Imaginez combien d’objets peut-on faire avec le papier de soie. Sans compter les miniatures, que l’on dessine dessus, on l’utilise pour fabriquer des petits sacs, des marque-pages, et même... des vêtements : vestes, robes, chemises, tuniques… !

De nos jours le système n’a pas beaucoup varié, mais il s’est adjoint la chimie, la mécanique et l’informatique... Mais revenons à l’histoire : une des particularités de ce papier de Samarcande c’est que son usage s’est propagé très lentement,tout simplement faute de lecteurs dans un monde grandement illettré. Jugez plutôt : En 800 il est connu à Bagdad, en1100 au Caire, en 1300 à Venise bien après l’Espagne, puis ce fut les premièreséditions des poètes ita liens, ensuite la France, l’Angleterre, la Hollande, l’Europe centrale enfin et jusqu’en Russie. Et pourtant ce fût une véritable opportunité pour la propagation des idées -l’Islam fût le premier à diffuser largement le Coran - avant de devenir le support universel de la pensée de l’époque mais aussi le point de départ d’une idée discutable qui soutient que tout écrit signé est intangible, sacré inviolable et vrai. C’était peut-être aussi ce que pensait le calife de Bagdad Haroun Al Rachid , contemporain de Charlemagne, après avoir constaté avec son grand bon sens que la falsification des documents était moins aisée sur du papier que sur du parchemin…